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jeudi 6 juin 2019

Le bestiaire ou cortège d'Orphée, Paris, Deplanche, éditeur d'art, 1911, Apollinaire (Guillaume), Dufy (Raoul)


IN:

On trouve une table des ouvrages étudiés.

 Référence Virtuelle:
https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb317256349



Notes:

cent vingt exemplaires
https://www.cairn.info/revue-le-francais-aujourd-hui-2004-1-page-62.htm


https://www.erudit.org/fr/revues/etudlitt/2011-v42-n1-
etudlitt5005183/1007157ar.pdf



http://bljd.sorbonne.fr/ark:/naan/a011446730697gagUfT/f249d6ee29





Francis Poulenc - Le Bestiaire ou Cortège d’Orphée for Tenor and Piano (1919) [Score-Video]






http://obvil.sorbonne-universite.site/corpus/apollinaire/apollinaire_bestiaire#note17




"Notice

Le Bestiaire ou Cortège d’Orphée est le premier recueil de poèmes publié par Guillaume Apollinaire, en 1911, à Paris, chez Deplanche, éditeur d’Art. Le tirage, à cent vingt exemplaires, signe de la part de ce jeune poète alors connu des seuls milieux littéraires symbolistes et modernistes une double exigence, de rareté et de perfection poétique.







































Comme tout recueil poétique, Le Bestiaire ou Cortège d’Orphée a son histoire. Dès l’origine, les poèmes sont indissociables d’un dessin qui les accompagne : le recueil doit être un recueil collaboratif qui réunit poète et peintre. Quant au texte, il a son histoire, faite de lectures qui donnent forme et consistance au projet.Apollinaire envisagera, en 1914, de réunir ses « idéogrammes lyriques » en un recueil intitulé Et moi aussi je suis peintre. Le projet échouera en raison de la Première Guerre mondiale. Dans Le Bestiaire, il fait un autre choix, celui d’une complémentarité de la lettre et de la ligne. Il est, depuis 1905, l’ami des peintres qui renouvellent radicalement la peinture, Derain, Picasso, Braque, Juan Gris. C’est précisément dans l’atelier de Picasso, au Bateau-lavoir, qu’il faut rechercher l’origine de ce recueil. Apollinaire a songé, très tôt, à associer le texte et l’image, et donc à confronter sur une même page deux systèmes sémiotiques différents, voire hétérogènes. Picasso avait entrepris des « gravures d’animaux » qui auraient inspiré à Apollinaire son projet de Bestiaire I. L’illustration aurait été composée de dessins réalisés d’un seul trait et gravées sur bois : mais Picasso n’illustra pas le recueil. Apollinaire se tourna vers Dufy, non sans avoir songé illustrer lui-même ses poèmes de dessins au trait et représenter les animaux dans un « graphisme simple parfois marqué d’une note d’humour »IILa correspondance échangée entre le poète et le peintre confirme combien le graveur a été attentif au texte et aux recommandations du poète. Il revient à chaque lecteur de lire avec ses propres yeux ce qui converge et diverge du poème à l’illustration. Il est évident que le narratif, les jeux sur le langage, les calembours (souris et souris, vaisseau et vaisseau, jeter l’ancre/l’encre etc.), les allusions érotiques (connin), les comparaisons (« Mon pauvre cœur est un hibou »), les allusions à la vie personnelle d’Apollinaire (à Marie Laurencin, par exemple) ne peut être transféré dans l’illustration. IIILes gravures de Dufy n’en sont pas moins fidèles à l’esprit qui domine le recueil. Les formes très géométriques et très sculpturales qu’il donne aux corps et au décor et le refus de toute proportion perspectiviste, dans ses illustrations, rappellent qu’il fut sensible à l’influence de Cézanne, un des pères du cubisme géométrique. Les formes gravées par Dufy ne sont pas figuratives : elles rappellent plutôt des langages plastiques archaïques et primitifs, observés et étudiés les peintres contemporains et par Apollinaire lui-même. IVLa convergence est donc évidente, entre un langage pictural moderne et une écriture poétique moderne : le retour à une forme de primitivité, y compris dans ce qu’elle a de populaire, permet en toute liberté une création poétique originale et innovante. A bien des égards, Le Bestiaire ou Cortège d’Orphée est une expérimentation poétique.Une lente maturation a conduit à l’état ultime des textes poétiques publiés en 1911. Apollinaire publie le 15 juin 1908 dans La Phalange, le n°24, La Marchande des quatre saisons ou le bestiaire mondain, qui réunit dix-huit poèmes. Orphée est absent du recueil à ce stade : La Marchande (ce quatrain sera intitulé Orphée dans l’état final), la Tortue, le Cheval, la Chèvre du Thibet, le Chat, le Lion, le Lièvre, le Lapin, le Dromadaire, La Marchande (ce sizain sera intitulé Orphée), la Chenille, la Mouche, la Puce, la Marchande (ce sizain sera intitulé Orphée), le Paon, le Hibou, Ibis, le Bœuf. Apollinaire opère deux changements significatifs lorsqu’il passe du Bestiaire mondain au Bestaire, et de la marchande à Orphée. En introduisant les animaux aquatiques, Apollinaire complète sa création des animaux de l’eau, qui côtoient les bêtes des airs et de la terre, de la plus humble, la puce, à la plus sublime, le Bœuf , figure du chérubin. En substituant à la figure populaire de la marchande des quatre-saisons, la voix de la rue, la figure mythique d’Orphée, la voix lyrique par excellence, Apollinaire anoblit son recueil, puisque, dans chaque poème intitulé Orphée, dans la lignée de la tradition orphique, le chantre interpelle le lecteur et se fait le montreur et le maître des règnes, des éléments, des animaux – voire le juge d’une époque qui enferme les lions dans des cages et les défait de leur royauté (le Lion, p. 000). D’une scène de rue où la marchande crie ses animaux, le lecteur passe à une scène poétique où le poète-Orphée dit et montre le monde animal. Apollinaire n’abandonne pas la scène de la rue : il transporte son poète-Orphée dans la rue, se souvenant peut-être qu’au XVIIème siècle un « cri de Paris », appelé « le Savoyard », chantait au Pont-Neuf cet air : « Je suis l’Orphée du Pont-Neuf/ Voici les bestes que j’attire/ Vous y voyez l’âne et le bœuf/ Et la nymphe avec le satyre. »V A la suite des symbolistes et de Mallarmé, Apollinaire installe Orphée dans la rue et le lyrisme dans le familier.La simplicité et la naïveté apparentes du recueil recouvrent une réelle érudition, un trait constant de la création poétique d’Apollinaire. Dans le Bestiaire mondain publié en revue, le texte est accompagné de quatre notes érudites, qu’il reprend et complète dans le Bestiaire ou Cortège d’Orphée. Il retient de ses lectures des détails, curieux, déroutants et énigmatiques pour le lecteur (par exemple dans la Mouche, « les mouches ganiques »). Mais l’érudition influence aussi l’esprit et la lettre du recueil : Apollinaire a pu trouver dans ses lectures la forme du quatrain d’octosyllabes, une écriture du détail qui permet de faire de la bête une allégorie morale de l’humain, un genre complexe où se croisent les traditions mythiques et religieuses et les traditions populaires. Marie-Jeanne Dury, Marc Poupon, Claude Debon, Anne Hyde-Greet, Etienne-Alain Hubert ont révélé à quelles sources Apollinaire a puisé son inspiration :





le « Compost et Kakendrier des bergiers, édité en 1493 à Paris par Guy Marchant », VI Le Monde enchanté de Ferdinand Denis où il a trouvé l’histoire de Don Pedro évoquée dans le Dromadaire, et le Bestiaire divin de Guillaume de Normandie VII, les bestiaires du Moyen-Âge, tous conçus à partir du Physiologus, ouvrage latin qui recueillait des allégories VIII, des commentaires d’Artus Thomas d’Embry à la Vie d’Apollonius thyanéenet le Pimandre ou le Poimandrès, qui noue le néoplatonisme et le christianisme pour faire de l’Hermès Trismégiste, très mythique, évoqué dans Orphée, un annonciateur, païen, de la Bonne nouvelle du Christ IX. A cette érudition qui entremêle les mythologies païennes et chrétiennes aux souvenirs littéraires de la carte du Tendre, Apollinaire, bien iconoclaste, juxtapose la référence à la tradition populaire de la voix de la rue : il a lu Les Cris de Londres au XVIIIe siècle, illustré de 62 gravures avec épigrammes en vers traduites par Mlle X…, préface, notes et bibliographie des principaux ouvrages sur les Cris de Paris, où chaque cri est accompagné d’un dessin et d’une épigramme, et les Cris de Paris de Victor Fournel X .André Breton a jugé sévèrement ce recueil : il voit en lui un « divertissement » XI. On peut en douter. Le recueil, au contraire, est remarquablement construit. La référence au Pimandre n’est pas simple anecdote érudite : en nous invitant à admirer « le pouvoir insigne/ Et la noblesse de la ligne » qui est « la voix de la lumière », Apollinaire noue chacun des poèmes et son illustration en un même ensemble qu’il soumet à une philosophie idéaliste et mystique. 





C’est bien l’acte créateur de l’artiste, poète et peintre, qui est montré dans le recueil. C’est aussi la divinité de l’artiste, poète et peintre, qui est affirmée, puisque, dans le Pimandre, la lumière, d’essence divine, divinise l’esprit et la pensée de l’homme. Le recueil répond ainsi parfaitement aux méditations esthétiques que réalise Apollinaire à cette époque. Il faut mettre l’accent sur deux points : la mise en ordre du chaos du monde part l’art et la figuration. A partir de 1908 et de la Préface au catalogue de la 3e exposition du cercle de l’art moderne à l’hôtel de Ville du Havre, « Les trois Vertus plastiques »XII, la flamme et la lumière, « symbole(s) de la peinture », sont au principe de « trois vertus plastiques » : « pureté », « unité », « vérité sublime » (p. 000). Dans Le Bestiaire, à l’ouverture du recueil (Orphée), la « ligne » qui enserre les formes devient la manifestation de ce feu, qui donne à chaque poème sa valeur dé vérité et son unité. De même que « chaque flammèche est semblable est semblable à la flamme unique » (p. 000), de même chaque poème est semblable au principe de la « ligne » qui le fonde. Le Bestiaire n’en est pas moins singulier. Alors que dans Alcools, en particulier dans le Brasier et les Fiançailles, Apollinaire fait le choix d’une composition fragmentaire et discontinue, dans le Bestiaire, il opte pour une écriture répétitive et sérielle, autrement apte à accueillir en ses retours la diversité des circonstances de la poésie. Cette répétition de mêmes formes –le quatrain, le quintil, le sizain- et de mêmes vers –l’octosyllabe, l’alexandrin-, est puissamment intégrante. Chaque lecteur note la multiplicité des thématiques du recueil : confidences douces-amères et mélancoliques d’Apollinaire (La Chèvre du Thibet, la Colombe), aspiration à une vie réglée (Le Chat), réflexions sur l’écriture poétique dans tous ses états, de la création à sa réception (La Sauterelle), considérations sur la condition du poète (La Chenille), déploration élégiaque sur le temps et la mort, peur de la femme et de l’amour. Cet éclatement, qui risque de rompre l’unité du recueil, est contenu par la forme : l’artiste met en ordre le chaos de sa propre existence et du monde. C’est cette conquête d’un ordre qu’Apollinaire que le poète salue dans l’œuvre de Matisse, en 1907, dans un article écrit pour La Phalange. Cet art poétique vaut pour le Bestiaire « Henri Matisse échafaude ses conceptions, il construit ses tableaux au moyen de couleurs et de lignes jusqu’à donner de la vie à ses combinaisons, jusqu’à ce qu’elles soient logiques et forment une composition fermée dont on ne pourrait enlever ni une couleur ni une ligne sans réduire l’ensemble à la rencontre hasardeuse de quelques lignes et de quelques couleurs. / ordonner un chaos, voilà la création. Et si le but de l’artiste est de créer, il faut un ordre dont l’instinct sera la mesure. » (p. 000) Le choix de l’allégorie, exceptionnel dans l’œuvre d’Apollinaire, prend aussi son sens en regard de cette poétique de la ligne et de la lumière. On observe que rarement la bête est le sujet actif du poème. Elle ne fait pas l’objet d’une description minutieuse : Apollinaire n’est ni le Jules renard des Histoires d’animaux ni le Claudel exégète du Porc dans Connaissance de l’Est, ni le Ponge du Parti pris des choses. Son éthique poétique s’appuie constamment sur un détail propre à l’animal, l’encre du poulpe, la tête de la méduse, le jeu des dauphins, la succion du sang par les puces, voire sur un point propre à une légende ou un mythe, la sauterelle dont saint Jean faisait sa nourriture, la figuration de l’esprit saint sous al forme d’une colombe. L’humain est proche de l’animal, qui lui-même est constamment tiré vers l’humain. Si la bête est humaine, l’homme est bestial. Autant dire que l’homme n’est plus la mesure des règnes : l’homme est puce, hibou, colombe ou méduse, eux-mêmes indissociables des grands mythes qui les ont humanisés. On trouvera, dans les méditations esthétiques contemporaines du poète, des déclarations qui éclairent cet usage pour le moins neuf de l’allégorie. Apollinaire, dans « La Peinture nouvelle. Notes d’art. », publié dans Les Soirées de Paris en avril 1912 XIII, définit la représentation propre aux peintres modernes. Alors que « l’art grec avait de la beauté une conception purement humaine », l’art nouveau défigure l’humain, comme le montre la citation que fait le poète du Crépuscule des idolesde Nietzsche : « Nietzsche avait deviné la possibilité d’un tel art : « Ô Dionysos divin, pourquoi me tires-tu les oreilles ? demande Ariane à son philosophique amant dans un de ces célèbres dialogues sur l’Île de Naxos. – Je trouve quelque chose d’agréable, de plaisant à tes oreilles, Ariane : pourquoi ne sont-elles pas plus longues encore ? » » (p. 000) Selon Apollinaire, la contemplation des « sculptures égyptiennes, nègres et océaniennes » a dicté cette défiguration de l’humain. La bête, ou plutôt les bêtes qui habitent les différents éléments, offrent ainsi à l’homme une « nouvelle mesure de perfection » (p. 000), perfection morale, certes, perfection poétique et perfection esthétique, assurément.Le Bestiaire ou Cortège d’Orphée est, on l’aura compris, à sa parution un livre d’art et d’artistes, au sens plein du terme. Il faut rendre à la page son format d’origine pour mesurer la surprise que l’image et le texte ont fait naître et doivent faire naître chez le lecteur : imprimé sur des presses à bras, le livre est un grand in-4° de 33 centimètres x 25 centimètres où la lettre et le trait, les mots et les formes, se répondent en un fascinant jeu de miroir. On le sait, les illustrations d’un peintre valorisent un recueil de poèmes, quel qu’il soit. Mallarmé avait ouvert la voie, Apollinaire s’y engage non moins résolument : la référence au maître de la rue de Rome n’est pas vaine pour qui veut comprendre le Bestiaire. Apollinaire voulait, d’ailleurs, émerveiller son lecteur : il souhaita que cette marque pour l’éditeur fut imprimée sur le livre : un traversé par une licorne avec cette devise : « J’émerveille. » XIV Objet d’art conçu pour quelques happy few, le recueil fut l’objet d’une réception discrète dans la presse. L’éditeur ne vendit que 50 des 120 exemplaires tirés, le reste fut soldé. Peu étudié, mal aimé des connaisseurs d’Apollinaire, le Bestiaire ou Cortège d’Orphée a eu une réception très contrastée, peut-être due à ses ambiguïtés archaïsantes et modernistes, aux illustrations de Dufy. Philippe Soupault ne voit en lui, lors de la réédition par les éditions de la Sirène en 1919, un « divertissement du poète ». Au même moment, Francis Poulenc met en musique six des poèmes du recueil, réalisant une autre alliance des arts, de poésie et de la musique."


http://www.collections-aristophil.com/html/fiche.jsp?id=9477223&np=&lng=en&npp=150&ordre=&aff=&r=


La reliure en France des origines à nos jours, tome 1 : 1959, Jean Rousseau-Girard, libraire expert, Devauchelle (Roger).

IN:


Référence virtuelle:
https://manuscripta.hypotheses.org/138




Notes:
https://gallica.bnf.fr/html/und/histoire/collection-de-manuscrits-merovingiens

https://archivesetmanuscrits.bnf.fr/ark:/12148/cc34040t

Ce que nous dit la description de la consultation faite par Mme Laffite:


"IXe siècle (vers 835-845 ?).
Manuscrit en latin"
"Écriture onciale à l'encre d'argent pour le texte des Évangiles, caroline pour les préfaces et sommaires; plusieurs mains. "

"
Reliure maroquin rouge au chiffre de Louis XVIII signée "REL P LEFEBVRE", train du 17 décembre 1817; cf. BnF, département des Manuscrits, Archives Modernes 624 ; chasses protégées à l’intérieur des plats par un cuir brun décoré d’un motif estampé à froid pastichant des décors utilisés sur les reliures au début du XVIe siècle. 
Plaques d'ivoire d'éléphant (VIe s.): constituées chacune de cinq parties sur chaque plat (370 x 305 mm) et autrefois ornées d'incrustations, les différents éléments s’emboîtent grâce à un système de réglettes et de rainures. — Défet dans le ms. BnF, latin 9488."

C’est la richesse de la transmission et de la conservation des livres ... chaque époque ajoute une strate qu'il faut garder ... la circulation des livres, des matériaux, les 
pratiques, leurs lieux constituent l'histoire du livre et des sociétés, des mœurs, us et coutures, croyances et religions, philosophies, littératures, sciences, techniques, économies.
La reliure en fait partie et il n’est pas question de juger ... mais de comprendre et de tirer des leçons.


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Pour aller plus loin, et faire le lien avec le début de la reliure, comprendre comment l'histoire de ce métier est une transmission des textes par la matérialité voir:
https://deslivressurleslivres.blogspot.com/2019/06/the-archaeology-of-medieval-bookbinding.html
 Avec un exemple concret .. mais je ne trouve pas la numérisation de ce livre, sauf des extraits sauf sur Wiki.

Voici encore un exemple de ce que la reliure n'a pas été conservée, seul le texte est transmis, sous différentes formes d'ailleurs.
Le célèbre Dioscoride.

"Très souvent les manuscrits byzantins n’ont pas gardé leur reliure primitive, indice précieux de leur origine. La plupart des reliures que portent encore de nombreux manuscrits grecs de nos bibliothèques sont relativement récentes (XIVe-XVIe siècle). Lors de leur acquisition dans une collection privée ou une bibliothèque, plusieurs de ces manuscrits perdent leur reliure ancienne et se dotent d’une reliure moderne ornée aux monogrammes et aux armes du collectionneur ou du roi de l’époque. Le très connu Dioscoride de Juliana Anicia, entre autres, a ainsi été relié à neuf au XVe siècle.

E. Y."
IN:
https://www.qantara-med.org/public/show_document.php?do_id=582&fbclid=IwAR2n7CGOL_MvMzUEXGFvtVlFpthkyphxp8XVhSMR_VsIsaxFy-zHr-ix4zc

Avec un croisement de ce qui est écrit dans la célèbre encyclopédie WIKI, souvent revue par des chercheurs qui connaissent bien le thème.
(Avant que cela ne change ...je copie colle avec une pensée pour ceux qui rédigent ces longues études documentées.)

Transmission du texte

Le texte grec du traité De Materia medica nous a été transmis directement par une dizaine de papyrus et une soixantaine de manuscrits sur parchemin. Il nous est aussi parvenu indirectement par de nombreuses traductions en latin, quatre traductions en arabe, trois traductions persanes et de nombreux extraits en syriaque. L'arrivée du papier en Europe par Al-Andalous suivie par la création de l'imprimerie à caractères mobiles par Gutenberg (vers 1440) vont permettre une large diffusion de l'ouvrage de Dioscoride en grec, latin et dans les langues européennes modernes.

Histoire du texte grec

L'ouvrage de Dioscoride fut surtout connu dans l'Empire romain dans sa version en langue grecque. Le manuscrit circula très rapidement dans tout le bassin méditerranéen, d'Égypte à Constantinople, de Syrie à Rome. Il revêtit des formes textuelles extrêmement différentes, variant suivant le nombre de notices (de 100 à 900 environ), de livres (de 1 à 9) ou de classement (alphabétique, thématique) et la présence ou non d'illustrations

Les Dioscoride sur rouleaux de papyrus aux iie et ive siècles

La version originelle du De Materia medica était écrite sur rouleau de papyrus. On connaît actuellement quatre rouleaux de papyrus contenant des fragments très limités de l’œuvre.
Au iie siècle : papyrus Aberdeen 8, Köln VII 312, Michigan inv 3.
Au ive siècle : papyrus Leiden X
Le papyrus Michigan inv 3, détenu à l'université du Michigan, Ann Arbor, constitué du fragment II, 76, a été composé dans la seconde moitié du iie siècle.

Les Dioscoride grecs en cinq livres


Dioscoride grec de Byzance xve siècle.
Paradoxalement, les manuscrits préservés qui sont jugés par les philologues (comme Max Wellmann (de) et Marie Cronier7) comme les plus proches du texte originel, ne correspondent pas aux manuscrits les plus anciens. Seule l'analyse philologique des longues chaînes de copies (arbre de filiation ou stemma codicum) permet d'estimer celles dont la source est la plus ancienne (avec parfois pour uniques témoins préservés des copies assez récentes).
Les manuscrits du groupe dit syro-palestinien par Cronier, sont composés de cinq livres regroupant les simples suivant leur nature et leurs propriétés. Ils comportent 800 notices (appelées aussi chapitres) signalées par une numérotation continue.
Les deux manuscrits les plus représentatifs sont le Parisinus gr. 2179 (situé à Paris, Bibliothèque Nationale) et le Laurentianus 74, 23 (à Florence, Bibliothèque Laurentienne). Le Parisinus gr. 2179 a été réalisé en milieu gréco-arabe à la fin du viiie siècle, probablement dans un monastère chrétien nestorien de Jérusalem. Parvenu en Italie vers le xiie siècle, il fut vendu à un ambassadeur de France à Venise au xvie siècle. C'est un manuscrit de luxe, réalisé avec une extrême minutie, écrit en majuscules sur un codex de parchemin et comportant 415 illustrations de plantes.
L'autre manuscrit important de ce groupe est le Florentinus Laurentianus 74, 23 qui constitue le seul exemplaire complet des cinq livres originaux de Dioscoride. Daté du début de xive siècle, réalisé probablement à Constantinople, cette copie présente un état textuel fort ancien, provenant d'un ancêtre commun en majuscules avec le Parisinus gr. 2179. Il est à l'origine de la grande majorité des copies réalisées aux xive et xve siècles.

Les « Dioscoride alphabétiques » grecs : les Herbiers alphabétiques

En l'absence de sommaire ou d’index, la recherche d'une drogue dans le traité De Materia medica, pouvait s'avérer difficile pour le praticien médical. C'est pourquoi Oribase, un médecin grec du ive siècle, originaire de Pergame comme Galien, proposa dans son ouvrage Collection médicale (en grec ancien Ἰατρικαὶ Συναγωγαί) un classement alphabétique des notices de Dioscoride. Il fournit par ordre alphabétique, dans les livres XI et XII, les médicaments simples issus des plantes et dans le livre XIII les médicaments d'origine minérale. Galien qui s'appuyait sur les descriptions des drogues données par Dioscoride, les classa aussi par ordre alphabétique. Il jugea très positivement la description des simples fournie par Dioscoride mais blâma la partie purement médicale de chaque notice.

Le manuscrit en grec, Codex medicus Graecus, dit Dioscoride de Vienne (vers 512), comporte 383 illustrations botaniques, comme celle-ci du chardon à foulon, (δίψακος, Dipsacus fullonum), avec annotations en arabe.
Par la suite, un certain nombre de notices sur les plantes furent extraites du Traité de Dioscoride et publiées par ordre alphabétique, sous le nom d’Herbier alphabétique grec. Ce manuscrit a probablement été réalisé à la fin du iie siècle ou au début du iiie siècle en Italie. Les deux manuscrits nommés le Dioscoride de Vienne et le Dioscoride de Naples sont à l'origine de tous les autres représentants de ces Herbiers alphabétiques.
Le plus ancien manuscrit de ce type connu à ce jour, est Vindobonensis medicus graecus 1, dit le Dioscoride de Vienne, conservé actuellement à Bibliothèque nationale autrichienne à Vienne en Autriche8. Ce manuscrit fut offert à la princesse Anicia Juliana, de la branche constantinopolitaine des Anicii, fille de l'éphémère empereur d'Occident (472), Flavius Anicius Olybrius,. Les habitants d'un faubourg de Constantinople passèrent commande du volume pour remercier la princesse d'avoir fait édifier en 512 une église dans leur quartier.
Connu aussi sous le nom de Codex Vindobonensis, ce manuscrit décrit 435 plantes médicinales, énumérées dans l'ordre alphabétique avec indication de leurs propriétés pharmacologiques, de leur utilisation et avec leurs illustrations en couleurs.
Au cours des siècles suivants, l'original de ce manuscrit a été abondamment utilisé comme ouvrage de référence et a souvent été recopié. On trouve sa trace au xiiie siècle dans la bibliothèque xénon du Kral jouxtant le monastère Saint-Jean Prodrome (quartier de Pétra, à Constantinople) où en 1350, un moine du nom de Néophitos (Néophyte Prodroménos) l'a copié. Une de ces copies se trouve d'ailleurs à la Bibliothèque nationale de France (Parisinus gr. 2286). Elle comporte 24 plantes de moins que le Codex Vindobonensis
En 1453, lorsque Constantinople tombe entre les mains des Turcs, le manuscrit continue à être apprécié par les nouvelles autorités et est consulté par de nombreux médecins qui laissent des annotations en langues persane, turque et arabe.
Au xvie siècle, le manuscrit arrive entre les mains de Hamon, le médecin juif de Soliman le Magnifique. L'ambassadeur de Ferdinand I, Augier Ghislain de Busbeck, déclare l'avoir trouvé chez Hamon, l'avoir acheté et offert à l'empereur Maximilien II du Saint-Empire. C'est cette copie qui est conservée actuellement à Vienne, et qui a reçu de multiples dénominations : Dioscoride de Vienne ou Codex Vindobonensis, Codex Constantinopolitanus, Codex Byzantinus, Codex Aniciae Julianae. Elle présente l'énorme intérêt pour l'identification des plantes, de fournir un grand nombre d'illustrations en couleurs et de donner des listes de synonymes pour la plupart des plantes. Il est d'ailleurs probable que les illustrations proviennent du Traité d’herborisation, le Rhizotomikon, de Cratevas. Le manuscrit a reçu en marge de nombreuses gloses, annotations et transcriptions en minuscules byzantines, latines, persanes et hébraïques qui nous éclairent sur les pérégrinations de l’œuvre avant son arrivée à la Bibliothèque Impériale de Vienne.
Bien que très ancien, ce volume qui a actuellement plus de 1 500 ans, nous livre un herbier assez remanié.

Histoire des traductions latines, syriaques, arabes et persanes

Premières traductions latines au iiie siècle, puis au viiie siècle

À Rome, l'hellénisme qui brillait encore à l'aube du ve siècle, ne survit pas à la prise de la ville par Alaric. Après la chute de Rome en 476, l'Empire byzantin reconquiert l'Afrique du Nord vandale puis l'Italie.
Le traité de Dioscoride était connu à Rome au moins à l'époque de Galien. Mais à cette époque, la culture grecque disparaissait progressivement du monde occidental et pour demeurer exploitables, les textes médicaux de l'Antiquité devaient être traduits en latin. C'est ce qui advint de l'ouvrage de référence de Dioscoride, traduit en latin sous le nom De materia medica.
La plus ancienne mention de Dioscoride dans la littérature latine, se trouve dans De herbis femininis, attribué à Gargilius Martialis, un auteur du milieu du iiie siècle. Sur les 71 chapitres de l’œuvre, les 34 premiers ont pour source Dioscoride mais on ne sait s'ils ont été traduits par Martialis ou quelqu'un d'autre. Pour localiser l'œuvre, on peut se rappeler seulement que Gargilius Martialis vécut dans la colonie romaine d'Auzia (Sour El Ghozlane, Algérie) où il mourut en 260.
Les secondes traductions latines connues à l'époque ancienne se trouvent dans la famille des manuscrits dits de Dioscoride Longobardus dont les deux représentants les plus significatifs sont le Monacensis Clm. 337 (au xe siècle) et le Parisinus lat. 9332 (fin du viiie siècle Fleury-sur-Loire, près d'Orléans). Les études philologiques suggèrent qu'ils pourraient dériver d'un modèle commun aujourd'hui disparu.
Le Codex Monacensis 337, de la Bayerische Staatsbibliothek à Munich (Allemagne) est écrit dans la graphie typique de Bénévent (Italie), il peut donc être attribué à la région de Naples au xe siècle. Il est formé de cinq livres, avec des notices numérotées de manière indépendante, et comporte d'abondantes illustrations. Le Parisinus lat. 9332, conservé à la BnF, comporte 869 notices (chapitres) et remonterait au viiie siècle.
On ne sait pas d'où provenait leur ancêtre commun, mais on sait qu'aux ve et vie siècles les deux centres principaux de traduction du grec en latin sont en Afrique du Nord et en Italie du Nord. Ces manuscrits furent largement diffusés de la fin du viiie siècle au début du xe siècle.
Les exhortations de Cassiodore (485-580), le fondateur du monastère de Vivarium en Calabre (Italie du Sud) à ses moines ont souvent été discutées7. À ses moines désireux de s'instruire en botanique et en médecine mais peu portés sur la langue grecque, il leur dit qu'ils peuvent pour cela s'aider d'un Herbier de Dioscoride où sont merveilleusement décrites et traitées les herbes des champs. Doit-on comprendre qu'il existait dès cette époque un Herbier de Diocoride en latin ? Cassiodore ne le dit pas. Les spécialistes, avec Marie Cronier, pensent que ce passage pourrait faire référence au De herbis femininis ou bien à une compilation illustrée de Dioscoride en latin.
Cette chaîne de copies latines fut remaniée au xiie siècle et donna des textes avec classification alphabétique, appelés Dyoscorides (avec un y), en relation avec l'école de médecine de Salerne. Ces textes furent enrichis d'additions venant de l’Alfabetum Galieni, un herbier médicinal du Haut Moyen Âge et d'Oribase, voire d'auteurs arabes. La Bibliothèque nationale de France possède trois exemplaires de ces Dioscoride latins alphabétiques. Contrairement aux autres Dioscoride alphabétiques, ces manuscrits englobent toutes les substances décrites par Dioscoride, aussi bien les végétaux que les animaux, les huiles, les onguents et les vins.
Jusqu'au xie siècle, en Europe, la médecine était enseignée dans les monastères et collégiales. Au siècle suivant, Hippocrate, Dioscoride et Galien commencent à être enseignés dans des centres spécialisés comme Paris ou Montpellier. La médecine se sépare dès lors des autres disciplines pour faire l'objet d'études tout-à-fait distinctes.
Dioscoride apparaît comme un auteur de référence. Mais contrairement à beaucoup d'auteurs classiques, son œuvre n'a pas été redécouverte à la Renaissance, car il n'a jamais cessé de circuler en Europe. Toutefois, il fut connu le plus souvent au Moyen Âge latin sous forme de courtes compilations illustrées et rarement dans sa forme complète et originelle.

Dioscoride en syriaque

Les premières traductions dans une langue sémitique du De Materia medica de Dioscoride furent faites en syriaque, une langue araméenne parlée à Édesse.
On ne connaît pas de texte complet de Dioscoride traduit en syriaque. Une trace se trouve chez le lexicographe jacobite Bar Hebraeus (1226-1286) qui aurait écrit en syriaque un résumé de la Matière médicalede Dioscoride.
L'étude philologique de plusieurs traductions en arabe de Dioscoride a permis de remonter la filiation des traductions du grec au syriaque puis à l’arabe. Ainsi, le manuscrit arabe Parisinus ar. 4947 daté du xiiie siècle (conservé à Paris) ainsi que sa copie Topkapi Ahmet III 2147 (Topkapı, Istanbul) sont des formes extrêmement abrégées de la Matière médicale de Dioscoride pouvant s'expliquer par la double traduction du grec en syriaque puis du syriaque en arabe. La préface du manuscrit de la bibliothèque Ahmed III ar. 2147 indique que la traduction a été effectuée du grec au syriaque par Gabriel b. Bocht-Ichô au ixe siècle.
Une autre traduction en arabe, due à Mihrân b. Mansur, est partie aussi d'une traduction en syriaque. Elle est connue par le manuscrit de Mashhad (Iran) réalisé au xiiie siècle et par sa copie Ahmet III 2147. Les phytonymes sont souvent en syriaque, indiquant par là que le traducteur ne connaissait pas leurs équivalents en arabe.

Dioscoride en arabe au ixe siècle

Le traité Περὶ ὕλης ἰατρικῆς de Dioscoride fut traduit du grec en arabe à Bagdad au milieu du ixe siècle, par Stéphane, fils de Basile (Stephanos ibn Basilos, Istifân b. Basîl), un disciple de Hunayn. Le prénom et l'ascendance de Stéphane en font probablement un chrétien nestorien dont la langue maternelle était le grec (et non l'arabe). Il donna une traduction assez pesante, reproduisant les tournures du texte source. Stéphane eut aussi beaucoup de mal à trouver le nom des plantes en arabe et dut souvent recourir à une simple translittération des termes grecs dans l'alphabet arabe. Les manuscrits arabes indiquent que la traduction de Stéphane fut révisée par Hunayn (Abi Zayd Hunain ibn Ishâq, 809-877) mais Cronier reste sceptique sur l'apport véritable de Hunayn. Celui-ci, d'origine nestorienne, était le médecin officiel du calife abbasside al-Mutawakkil de Bagdad.

Livre arabe des remèdes simples d’après le Materia Medica de Dioscoride. Le cumin et l'aneth. C. 1334, par Kathleen Cohen's au British Museum de Londres.
La traduction de Stéphane et Hunayn, connue sous le nom de Livre des plantes médicinales (Kitâb al-Hashs' sish fi Mawâdd al-Ilâj), se répandit dans le monde arabo-musulman et devint le fondement de la pharmacopée musulmane.
L'Occident latin n'a jamais connu de traduction en latin du texte arabe de Dioscoride. L'ouvrage de Dioscoride ne fait pas partie des traductions en latin des ouvrages arabes effectués au xie siècle par Constantin l'Africain à Salerne. Par contre des commentaires et des remaniements arabes de Dioscoride furent traduits en latin à Tolède aux xiie et xiiie siècles.

Dioscoride arabe, Espagne xiie et xiiie siècles.
À cette époque, les contacts entre le Proche Orient et l'Europe se faisaient par l'intermédiaire de l'Al-Andalus (l'Espagne musulmane). À Cordoue, l’œuvre de Dioscoride était connue à travers la traduction de Stéphane mais d'après Ibn Gulgul, un historien de la médecine de l'époque, une version améliorée de la traduction aurait été effectuée sur place. Suivant Gulgul, sous le règne de Abd al-Rahman III, l'empereur Armanius de Constantinople envoya (vers 948-949) au calife Omeyyades de Cordoue, une ambassade chargée de cadeaux dont un Dioscoride grec richement illustré.
Le projet se forme alors d'établir une nouvelle version en comblant les lacunes lexicographiques des précédents traducteurs. Le besoin premier est alors de reconnaître les substances médicinales pour rapprocher la terminologie grecque de celle utilisée par les médecins arabo-musulmans. Comme en ces temps-là, il n'y avait personne à Cordoue sachant le grec, le calife fit venir de Constantinople, le moine byzantin Nicolas qui maîtrisait aussi bien le grec que l'arabe. Arrivé à Cordoue en 951-952, Nicolas, entouré d'érudits andalous, dont Abou Abdallah es-Siqili, travailla à améliorer la traduction des phytonymes.
Toutefois, étrangement, cette amélioration du texte par Nicolas n'a laissé aucune trace documentaire.
Une autre traduction de la version syriaque de Dioscoride en arabe fut faite par Mihrân ibn Mansur, au xiie siècle. Laquelle fut ensuite traduite en persan par Ali ibn Sherif al-Huseyni, comme en témoigne un manuscrit de la bibliothèque du Palais de Topkapı. Cette version persane est l'aboutissement de trois traductions successives : du grec, au syriaque, à l’arabe et au persan.
Une autre traduction persane est attestée à partir de la traduction de Stéphane et Hunayn (Leidensis or. 289 conservé à Leyde). Elle aurait été effectuée en 510 de l'hégire(1116-1117).

Renaissance, imprimerie et traductions dans les langues modernes

Premières impressions des Dioscoride latin et grec, en Italie en 1478 et 1499

Pendant tout le Moyen Âge, l'Europe occidentale a eu accès au texte de la grande encyclopédie pharmaceutique de Dioscoride, Περὶ ὕλης ἰατρικῆς, à travers les copies manuscrites de sa traduction latine : De materia medica, à l'exception de l'Italie du Sud, hellénophone, et de l'Espagne musulmane, arabophone.
À la fin du xve siècle, arrivent cependant en Italie quelques manuscrits byzantins conservant la langue grecque originelle. Ils reçurent un accueil enthousiaste de la part des humanistes de la Renaissance qui cherchaient à retrouver les textes originels. L'imprimeur Alde l'Ancien de Venise se fait aider d'érudits grecs venus de Byzance, pour éditer et imprimer le texte grec de Dioscoride. L'édition aldine en grec de 1499, puis celle de 1518, seront reprises par presque toutes les éditions et traductions du xvie siècle. L'aldine de 1499 se présente en cinq livres auxquels sont ajoutés les deux traités apocryphes des Alexipharmaques et des Thériaques, placés dans les livres VI et VII-IX. Cette édition servira à l'édition d'un Dioscoride bilingue grec-latin, parue chez Johann Bebel à Bâle et chez J. Soter à Cologne, en août 1529, et à la traduction en latin de Marcellus Vergilius en 1532. Une édition bilingue est imprimée à Paris en 1549 chez Arnold Birkmann. Toutes ces éditions reposent sur l'édition aldine dont la suprématie ne cessera qu'avec celle de Wellmann.

De materia medica
Page de titre
de l'édition bilingue
de 1549 
(trad. de Jean Ruel)
Toutefois, la première édition de l'œuvre de Dioscoride, imprimée en 1478 à Colle en Toscane par Johannes Alemannus de Medemblick, est celle de la traduction latine de Pierre d'Abano (1250-1318). L'effort de traduction est poursuivi sous François Ier par le doyen de la faculté de médecine de Paris, le botaniste Jean Ruel (1479-1537). Sa nouvelle traduction en latin de Dioscoride est publiée à Paris en 1516 chez Henri Estienne l'Ancien, la même année que, à Venise, celle d'Hermolao Barbaro (1384-1496). Les qualités du travail de Jean Ruel, liées à ses compétences en philologie, botanique et médecine, sont la clé du succès d'un ouvrage qui connut vingt rééditions au xvie siècle et dont le traducteur eut pour élèves deux auteurs et autres importants traducteurs du De Materia Medica : Michel de Villeneuve et Andrés Laguna. L'ouvrage corrigé et réédité en 1530, deviendra un livre de référence.

Les Dioscoride en langues modernes à partir du xvie siècle

Retour à la source
À la Renaissance, les humanistes trouvèrent le texte de Dioscoride défiguré par des siècles de copies et traductions peu fidèles. Ils cherchèrent le texte primitif pour le traduire dans les langues vernaculaires d'Europe afin qu'il soit disponible au plus grand nombre.

De medicinali materia libri sex, Joanne Ruellio Suessionensi interprete.
Les premières traductions du Περὶ ὕλης ἰατρικῆς dans les langues modernes ont commencé au xvie siècle :
  • en italien en 1542 par S. Fausto da Longiano, puis en 1546 par Montagiano.
  • en français en 1553 de Martin Mathée chez B. Arnoullet à Lyon, puis en 1669 par Ruelle le jeune.
  • en espagnol en 1555 par Andés Laguna.
  • en anglais en 1655 par John Goodyer
Le Siennois Pierandrea Mattioli (1501-1577) publia à Venise une traduction commentée du Materia medica, d'abord en italien en 1544, puis en latin en 1554. Cette contribution significative au travail de Dioscoride fut traduite en français par Jean des Moulins en 1572 et en allemand par Camerius, en 1626. À la suite de Mattioli, d'autres botanistes ont apporté leur contribution personnelle en publiant des commentaires, comme Walther Ryff (1543) et Valerius Cordus (1561).
Au terme de 1 500 ans d'histoire, le texte de l'Aldine de Dioscoride, se retrouve comme il était à l'origine, débarrassé des scories des copistes, mais sans avoir accompagné un progrès notable dans l'identification et l'usage thérapeutique des plantes. Durant cette longue période, il fut utilisé :
  • soit comme un manuscrit d'apparat richement illustré, présent à la cour de Naples, de Byzance ou de Cordoue et objet de somptueux cadeaux princiers
  • soit en usage médical auprès des princes ou en milieu monacal, les médecins laissant en marge des annotations en diverses langues.
Analyse botanique et médicinale
Les progrès significatifs dans l'analyse botanique ou médicinale des simples sont faits au xvie siècle quand les commentateurs médecins (comme Mattioli) ou botanistes (comme Pitton de Tournefort et au xviiie siècle avec Humphrey Sibthorp) commencent à contribuer positivement à l'avancement des connaissances. Au cours des siècles précédents, le souci des copistes semblait être de préserver un patrimoine culturel, comme ils le faisaient des classiques de la littérature. Les commentaires n'étaient que des exégèses savantes d'une œuvre canonique indépassable.
Les efforts de Mattioli pour identifier les plantes décrites dans le Materia medica, se sont poursuivis au xviie siècle avec Joseph Pitton de Tournefort qui fit un long voyage au Levant en 1700-1702, jusqu'aux frontières de la Perse, pour herboriser sur les pas de Dioscoride. L'esprit d'ouverture et de curiosité sur le monde, propre aux philosophes des Lumières, préférant observer la nature que de s'en remettre aveuglément aux Anciens, commençait à souffler. « Il ne se proposait pas de moindres avantages pour la botanique, ayant dessein de vérifier sur les lieux, si ce que Théophraste, Dioscoride, Mattioli et les autres anciens auteurs avaient écrit des plantes, était conforme à la vérité » (Fontenelle, Abrégé historique p. 446). À la fin du xviiie siècle, le botaniste anglais John Sibthorp poursuit cette quête des plantes décrites par Dioscoride, et au retour de deux voyages en Grèce et en Asie Mineure, rédige une Flora Graeca, l'une des plus belles flores au monde, qui sera publiée en dix volumes entre 1806 et 1840. Après une longue période de stagnation, de régression et un lent réveil (à l'école de Salerne, puis au xiiie siècle en al-Andalus), la botanique savante dont les grandes lignes avaient été esquissées il y a deux millénaires par Théophraste et Dioscoride, avançait à nouveau à grands pas.
Pour en revenir aux traducteurs, le médecin espagnol Andrés Laguna est aussi une figure tout à fait représentative de l'humanisme européen. Né à Ségovie, d'un médecin juif converti, il va étudier à l'université de Paris la médecine, les arts et les langues classiques. Il vit aux Pays-Bas, exerce la médecine à Metz, puis il se rend en Italie, où il est nommé docteur de l'université de Bologne. Il gagne ensuite Anvers où il publie en 1555, la version castillane de Dioscoride enrichie de commentaires substantiels, sous le nom de Pedacio Dioscôrides Anazarbeo, Acerca de la materia medicinal y de los venenos mortiferos... Cette traduction connut un immense succès en Espagne où les rééditions se succédèrent du XVIe au XXe siècles. Ce fut la principale source d'information botanique, pharmacologique et commerciale pour les pharmaciens jusqu'au début du xxe siècle.

Bibliographie

Œuvres

  • Les Six Livres de Pedacion Dioscoride d'Anazarbe de La Matiere Medicinale: Translatez de Latin en Francois, Lyon, 1553.
  • (en) R. T. Gunther, éd. The Greek Herbal of Dioscorides (Oxford University Press), 1933.
  • (es) Bonne traduction espagnole en 1998 (due à Manuela Garcia Valdes).
  • (en) Dioscorides. De materia medica. Five books in one volume, trad. T. A. Osbaldeston, introd. R. P. Wood, Johannesbourg (Afrique du Sud), Ibidis Press, 2000.
  • (de) Pedanius Dioscorides of Anarzarbus, De materia medica, trad. Lily Y. Beck (Altertumswissenschaftlichen Texte und Studien, 38), Hildesheim, Olms, 2005. -- Traduction de référence.

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 Nous arrivons à ce tutoriel qui explique comment faire une reliure byzantine selon le modèle:
Cote Paris. gr. 2650
Copiste Différents copistes non répertoriés
Date du manuscrit XIVe-XVe siècles, en partie copié en 1427 Folios et support 215 folios de papier 
Datation de la reliure XVe siècle
Origine de la reliure Prodrome de Pétra de Constantinople
Dimensions de la reliure 235 x 143 x 65 mm